Il y a quelques semaines, Clara et Clément ont animé la première matinée d’échanges baptisée Les Rencontres de la FUB. La Fédération des usagers de la bicyclette (FUB) ouvre une série de rencontres pour sensibiliser les journalistes à l’écosystème vélo. Pour se faire, différentes thématiques seront abordées, présentées par des spécialistes qui sauront décrypter les problématiques liées à la mobilité durable. La première thématique était consacrée à la compréhension des enjeux liés à la sécurité routière. Un sujet qui nous concerne toutes et tous, tant le vélo peut être perçu, pour certain.es, comme dangereux et source de nombreux conflits dans l’espace public. Comment dépasser cet apriori et rendre visible la solution vélo ? Quelle est la représentation de l’accidentalité liée aux mobilités actives en France ? Quelques pistes de réponses.
L’accidentalité et les mobilités actives en France
• L’accidentalité baisse depuis 1972, surtout parmi les automobilistes. Depuis le début des années 2010, il y a ralentissement de cette baisse, voire une légère augmentation parmi les cyclistes et les piétons.
• D’après le bilan d’accidentalité ONISR (Observatoire National Interministériel de la Sécurité Routière) de 2021, sur 100 décès en agglomération environ 10 décès concernent les cyclistes, 30 les piétons et les 60 autres décès touchent des individus conduisant des modes motorisés. Hors agglomération, sur 100 décès, environ 5 décès concernent les piétons, 7 les cyclistes et les 88 autres décès concernent des individus conduisant des modes motorisés.
• En 2022, selon le bilan provisoire de l’accidentalité, il y a plus de décès à vélo quand on roule sur les voiries hors-agglomération qu’en agglomération, quand on est un homme de plus de 65 ans et quand on a une pratique sportive ou de loisirs.
• Le concept de sécurité par le nombre démontre que plus il y a de cyclistes et de déplacements réalisés à vélo, moins il y a de risque de subir un accident mortel. Ce concept est aussi vérifié pour la marche.
•Les accidents mortels sont la partie émergée de l’iceberg des problèmes de sécurité routière. La compilation de l’ensemble des conflits vécus par les individus prend la forme d’une pyramide : il y a une hiérarchie claire de la régularité des conflits vécus selon leur gravité.
Figure 1 – L’usage du vélo et le risque de décès à vélo (moyenne sur la période 2008-2015)
L’approche systémique de la sécurité routière
• Les visions de sécurité routière s’inscrivent dans un spectre allant d’une approche basée sur la culpabilité à une approche systémique. Cette dernière présente les erreurs humaines non pas comme les seules causes « d’accidents » (qui relèveraient alors de la fatalité), mais comme des failles du système de voirie et des transports sur lesquelles il est possible d’agir. Sous ce paradigme, la responsabilité de réduire les conséquences des accidents est partagée entre toutes les parties prenantes, et non plus uniquement sur les usagers.
Figure 2 – Les 5 piliers du système sûr
• Cette approche systémique est cohérente avec la recherche. En France, une étude du Cerema confirme l’aspect multifactoriel des causes d’accident. Si les facteurs humains sont prépondérants parmi les facteurs causaux, ils le sont souvent en conjonction avec des facteurs liés à l’environnement (infrastructures et conditions de circulation) et au véhicule. Il est donc difficile de lier une collision ou une chute à une cause unique, a fortiori en l’absence d’enquête sur l’incident.
• Dès ses débuts en 1972, la politique publique de sécurité routière revêt un caractère interministériel et agit sur le triptyque usagers-infrastructures-véhicules. Cependant, elle perd progressivement son caractère transverse et son efficacité ralentit depuis 2013. En 2021, la Cour des comptes publie un rapport avec des recommandations clés, parmi lesquelles le renouvellement conceptuel explicite autour du système sûr.
• Ailleurs, le système sûr est de plus en plus présent dans les politiques de sécurité routière. Aux Pays-Bas, il prend la forme de la « sécurité durable » depuis 1992, et en Suède, de la « Vision Zéro » depuis 1997.
Dans la déclaration de la Valette de 2017, l’Union européenne s’inscrit aussi dans l’adoption d’une approche « système sûr » et de la prise en compte des piétons et cyclistes dans les politiques de sécurité routière.
Le traitement médiatique de la sécurité routière
• La balance des impacts sanitaires du vélo et de la marche est globalement positive, principalement en raison de la réduction de maladies chroniques engendrée par l’activité physique. En France, l’évaluation d’impact sanitaire de la hausse de la pratique des modes actifs à horizon 2050, réalisée par l’association négaWatt, quantifie à près de 10 000 les décès prématurés évités annuellement et plus de 40 milliards d’€ de bénéfices.
Figure 3 – Décès prématurés évités par type de mode actif, scénario négaWatt 2020-2050
• La sécurité routière n’est qu’un aspect parmi l’ensemble des enjeux du développement des modes actifs. Le traitement médiatique des questions de cohabitation impliquant les cyclistes participe à la mise à l’agenda des sujets de sécurité routière.
Quelques plateformes ressources à suivre
• L’Observatoire des cyclistes accidentés à vélo
• Les comptes Twitter de @unevoiture_ pour de la veille et @PolGM1 sur les chiffres de la sécurité routière
• La plateforme de l’ADMA, notamment la fiche thématique dédiée à « L’approche pour un système sûr : nouveau paradigme de sécurité routière » disponible en téléchargement
• Les actualités et communiqués de presse publiés par la FUB
Bibliographie
• ONISR Accidentalité routière 2021 et Accidentalité routière 2022 • CEREMA (2021) Les facteurs d’accidents mortels de la circulation en France en 2015 • Cour des comptes (2021) La politique publique de sécurité routière • Jean, K., & Quirion, P. (2022, août 30). Marche, vélo : Les gains sanitaires et économiques du développement des transports actifs en France The Conversation • Goddard, T., Ralph, K., Thigpen, C. G., & Iacobucci, E. (2019) Does news coverage of traffic crashes affect perceived blame and preferred solutions? Evidence from an experiment. Transportation Research Interdisciplinary Perspectives, 3, 100073
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